LE BRUIT ET LA FUREUR (22 juilet 1954)
En 1947, la poésie onomatopéïque marquait la première intervention scandaleuse d’un nouveau courant d’idées. Un groupe réuni sous la dénomination de « lettristes », à cause de la poétique qu’il proclamait, devait dans les années qui suivirent étendre son champ d’action au roman, à la peinture (1950) et au cinéma (1951).
Dadaïsme en positif, cette époque du mouvement opéra la critique de l’évolution formelle des disciplines esthétiques, dans un souci exclusif de nouveauté qui n’était pas — comme on nous l’a trop facilement objecté — goût de l’originalité à tout prix, mais volonté de se soumettre les mécanismes de l’invention. L’élargissement dialectiquement prévisible des objectifs du Lettrisme, marqué par de vives luttes de factions et l’exclusion de meneurs dépassés, devait situer le problème dans la seule utilisation de ces mécanismes, à des fins passionnelles.
L’Internationale lettriste, fondée en juin 1952, a groupé la tendance extrémiste du mouvement. En octobre de la même année, à la suite des incidents provoqués par les tenants de l’Internationale contre Charles Chaplin, et du désaveu de ce geste par la droite lettriste, l’accord avec la tendance rétrograde était dénoncé, et ses membres épurés.
Notre démarche s’est, depuis, précisée à toute occasion.
Nous avons toujours avoué qu’une certaine pratique de l’architecture, par exemple, ou de l’agitation sociale, ne représentait pour nous que des moyens d’approche d’une forme de vie à construire.
Seule, une hostilité de mauvaise foi conduit une part de l’opinion à nous confondre avec une phase de l’expression poétique — ou de sa négation — qui nous importe aussi peu, et autant que toute autre forme historique qu’a pu prendre l’écriture.
Il est aussi maladroit de nous limiter au rôle de partisans d’une quelconque esthétique que de nous dénoncer comme on l’a fait par ailleurs, en tant que drogués ou gangsters. Nous avons assez dit que le programme de revendications défini naguère par le surréalisme — pour citer ce système — nous apparaissait comme un minimum dont l’urgence ne doit pas échapper.
Quant aux ambitions personnelles, elles sont assez peu conciliables avec les causes pour lesquelles nous nous sommes délibérément compromis.
22 juillet 1954
Pour l’Internationale lettriste :
MICHÈLE-I. BERNSTEIN,
ANDRÉ-FRANK CONORD,
MOHAMED DAHOU,
G.-E. DEBORD,
JACQUES FILLON,
VÉRA,
GIL J WOLMAN
« Le Bruit et la fureur », Potlatch. Bulletin d’information du groupe français de l’Internationale lettriste, numéro 6, 27 juillet 1954
Dadaïsme en positif, cette époque du mouvement opéra la critique de l’évolution formelle des disciplines esthétiques, dans un souci exclusif de nouveauté qui n’était pas — comme on nous l’a trop facilement objecté — goût de l’originalité à tout prix, mais volonté de se soumettre les mécanismes de l’invention. L’élargissement dialectiquement prévisible des objectifs du Lettrisme, marqué par de vives luttes de factions et l’exclusion de meneurs dépassés, devait situer le problème dans la seule utilisation de ces mécanismes, à des fins passionnelles.
L’Internationale lettriste, fondée en juin 1952, a groupé la tendance extrémiste du mouvement. En octobre de la même année, à la suite des incidents provoqués par les tenants de l’Internationale contre Charles Chaplin, et du désaveu de ce geste par la droite lettriste, l’accord avec la tendance rétrograde était dénoncé, et ses membres épurés.
Notre démarche s’est, depuis, précisée à toute occasion.
Nous avons toujours avoué qu’une certaine pratique de l’architecture, par exemple, ou de l’agitation sociale, ne représentait pour nous que des moyens d’approche d’une forme de vie à construire.
Seule, une hostilité de mauvaise foi conduit une part de l’opinion à nous confondre avec une phase de l’expression poétique — ou de sa négation — qui nous importe aussi peu, et autant que toute autre forme historique qu’a pu prendre l’écriture.
Il est aussi maladroit de nous limiter au rôle de partisans d’une quelconque esthétique que de nous dénoncer comme on l’a fait par ailleurs, en tant que drogués ou gangsters. Nous avons assez dit que le programme de revendications défini naguère par le surréalisme — pour citer ce système — nous apparaissait comme un minimum dont l’urgence ne doit pas échapper.
Quant aux ambitions personnelles, elles sont assez peu conciliables avec les causes pour lesquelles nous nous sommes délibérément compromis.
22 juillet 1954
Pour l’Internationale lettriste :
MICHÈLE-I. BERNSTEIN,
ANDRÉ-FRANK CONORD,
MOHAMED DAHOU,
G.-E. DEBORD,
JACQUES FILLON,
VÉRA,
GIL J WOLMAN
« Le Bruit et la fureur », Potlatch. Bulletin d’information du groupe français de l’Internationale lettriste, numéro 6, 27 juillet 1954
0 Comments:
Post a Comment
<< Home