Wednesday, March 21, 2007

POUR COMPTE


POUR COMPTE

Dans l'Arabie des trois midis
des tours aux fronts de caïmans
dans l'Arabie de ta peau neuve
et des turbans de rêve noir
le feu tinte dans les cloches
douce est la parole de l'eau
sous la clé des nuits légères
enchaînées au coeur des filles
le feu lèche les mirroirs
les museaux des endormies
brûlent sous le regard fendu
dans l'orange du matin
c'est pour ces pays d'un sou
que se vide la mémoire
pour la neige et la flamme
dont se parlent les étoiles
sous la crinière aveugle
court le feu inassouvi
le cristal vivant des sources
dans les eaux de l'avenir
va mon enfant
dors mon cheval
il n'y a pas assez de paix
dans les justes mains des cimes
pour couvrir la voix des villes.


Tristan TZARA, « Pour compte », PHASES, 1949

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