UNE ARCHITECTURE DE LA VIE (JORN, Décembre 1954)
Nous publions aujourd'hui quelques extraits du livre d'Asger Jorn Image et Forme sur l'architecture et son avenir, problème que nous n'avons cessé de soulever ici. (Voir notamment PROCHAINE PLANÈTE dans le numéro 4 de Potlatch et LES GRATTE-CIEL PAR LA RACINE dans le numéro 5.)
Nous avons traduit la récente édition italienne qu'Asger Jorn nous a fait parvenir.
Elle est elle-même traduite du danois.
Utilité et fonction resteront toujours le point de départ de toute critique formelle ; il s'agit seulement de transformer le programme du Fonctionnalisme.
... Les fonctionnalistes ignorent la fonction psychologique de l'ambiance... l'aspect des constructions et des objets qui nous environnent et que nous utilisons a une fonction indépendante de leur usage pratique.
... Les rationalistes fonctionnalistes, en raison de leurs idées de standardisation, se sont imaginé que l'on pouvait arriver aux formes définitives, idéales, des différents objets intéressant l'homme. L'évolution d'aujourd'hui montre que cette conception statique est erronée. On doit parvenir à une conception dynamique des formes, on doit regarder en face cette vérité que toute forme humaine se trouve en état de transformation continuelle. On ne doit pas, comme les rationalistes, éviter cette transformation ; la faillite des rationalistes, c'est de n'avoir pas compris que la seule façon d'éviter l'anarchie du changement consiste à prendre conscience des Lois par lesquelles la transformation s'opère, et à s'en servir.
... Il est important de comprendre que tel conservatisme des formes est purement illogique parce qu'il n'est pas causé par le fait que l'on ne connaît pas la forme définitive et idéale de l'objet, mais bien par le fait que l'homme s'inquiète s'il ne trouve pas une part de « déjà vu » dans le phénomène inconnu... Le radicalisme des formes est causé par le fait que les gens s'attristent s'ils ne trouvent pas dans le connu quelque chose d'inusité. On peut trouver ce radicalisme illogique, comme font les tenants de la standardisation, mais on ne doit pas oublier que la seule voie vers la découverte est donnée par ce besoin de l'homme.
... L'architecture est toujours l'ultime réalisation d'une évolution mentale et artistique ; elle est la matérialisation d'un stade économique. L'architecture est le dernier point de réalisation de toute tentative artistique parce que créer une architecture signifie construire une ambiance et fixer un mode de vie.
Asger Jorn
Asger JORN, « Une Architecture de la vie », Potlatch. Bulletin d'information du groupe français de l'Internationale lettriste, numéro 15, 22 décembre 1954
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